le Faux-Soi-Ailleurs

2018-2019 Tatouage tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, françois theurel, par olivier poinsignon



le Faux-Soi-Ailleurs,


temps de lecture 7 minutes








Finalement à qui je m’adresse quand je poste un tattoo en ligne ? Alter ego, image, fantasme, communauté, réseaux sociaux ? Et si j’essayais moi aussi de prendre le temps là où tout va trop vite ?

J’ai attendu quatre mois avant de poster la suite de ce projet tatouage. Je voulais qu’il aille de pair avec une réflexion sur le temps. Et justement on a pris un an avant d’ajouter la ligne finale du projet. Cette simple ligne qui vient donner un filet d’air à ce bloc de textures. Si cette ligne était pensée et avait la place d’exister dès notre première rencontre… il fallait donner du temps au temps pour qu’elle soit digérée. Il fallait la digérer avant de briser le cadre qui lui donnait sa raison d’exister.
Ne vous arrive-t-il jamais de vous regarder dans le miroir suffisamment longtemps pour redécouvrir qui vous êtes ? Ce long temps qui permet de se regarder en inconnu sans aucune sympathie ni fantasme de notre image, simplement un nouvel individu qui nous laisse le regarder de près sans dire un mot. S’éloigner de son image afin de la redécouvrir. C’est ce qui peut se passer quand on se fait tatouer. C’est ce qui se passe quand on prend le temps de se perdre en soi, ou plutôt quand on prend le temps de se chercher. On laisse la place à un détail qui nous dépasse, on lâche prise pour pouvoir vivre aussi avec ce que l’on ne contrôle pas. On se donne l'occasion de redevenir un inconnu à apprivoiser devant la glace. On peut finalement constater que certaines choses en nous nous constituent, sans pour autant nous appartenir, nous définir, et nous condamner à une seule version de nous-mêmes. On se rend compte que laisser la main de l’autre décider peut nous conforter un peu plus dans ce que l’on est ou au contraire renforcer la conscience de ce que l’on n’est pas.


2018-2019 Tatouage tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, françois theurel, par olivier poinsignon

2018-2019 Tatouage tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, françois theurel, par olivier poinsignon  2018-2019 Tatouage tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, françois theurel, par olivier poinsignon

2018-2019 Tatouage tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, françois theurel, par olivier poinsignon
2018-2019 Tatouage bras épaule, noir et gris, lignes et textures, contrôle et quête du vif.



Et si on faisait de la place aux autres, et si tout le monde ne s’exprimait que quand il avait vraiment un truc “important” à dire.  Et si on parlait pour partager ou même “donner” plutôt que d’essayer seulement de “voler l’attention des autres”. Parler doit être un dilemme. Parler altère un silence qui est de plus en plus difficile à obtenir. Le silence c’est justement ce qui me ratione dans mes prises de parole. 
Paradoxalement j’ai développé cette réflexion grâce à Internet. Je me suis approprié cette idée un peu plus chaque jour devant ce miroir noir qui s’illumine à la place du silence.
J’ai beaucoup grandi et évolué là où le silence n’existe pas : sur les réseaux sociaux. Facebook, Instagram et d’autres forums m’ont ouvert des portes sur le monde comme des petits trous de verre. Des trous me permettant d’accélérer les rencontres en surfant d’un continent à un autre en l’espace de quelques secondes. Mais comme si l’on laissait un bout de chair à chaque voyage, le prix à payer peut être la dématérialisation de sa propre personne. Ces interfaces virtuelles consomment trop de temps et nous éloignent de la chair. 
Ainsi mon corps s’était voûté et ramolli un peu plus au cours de ces cinq dernières années… C’est en partie pour cela que je n’ai pas donné signe de vie depuis presque trois mois. J'ai pris soin de me raffermir. Je veux donc continuer de construire ma recherche et mon identité dans la vraie vie et la laisser déborder sur les réseaux quand je le choisis. Mes moteurs ne peuvent être virtuels si je ne veux pas devenir un fantôme. Ma grande chance dans tout cela c’est de pratiquer, de provoquer et de ressentir la douleur à travers le tatouage. Cette douleur qui une fois quelques rires passés peut nous couper le souffle et faire poindre quelques larmes. Cette douleur qui nous fait sentir la gravité de la vraie vie loin de tout écran, bien dans la chair, bien dans le sang, bien dans le temps.
Mais je crois que j’ai besoin d’un peu d’Internet dans mon sang. Internet catalyse et cumule l’attention des gens. L’attention fait vivre ceux qui la reçoivent. Mais combien de contenu en ligne enrichissent réellement votre quotidien ? A l’inverse, dans quelle proportion le contenu “innocent” occupe-t-il votre attention ? Vous savez bien, ce contenu qui semble anodin, qui ne fait aucun mal en apparence mais qui permet de “décompresser”. Ce contenu qui nous vole cinq minutes par ci et par là. Ce contenu qui nous a éloigné de la télé… pour bien pire ! Ce contenu qui nous détourne d’une soirée entre amis, d'une main sur l'épaule, d’un matin avec nos enfants, d’une attente avec des humains à l'arrêt de bus ou encore de votre partenaire, le soir avant de fermer les yeux. Non, je ne veux pas être ce contenu pour vous !




2018-2019 Tatouage cotes épaule cou clavicule, noir et gris, lignes et textures , trajet et fantômes. lolikata par olivier poinsignon tatouage clermont-ferrand

2018-2019 Tatouage cotes épaule cou clavicule, noir et gris, lignes et textures , trajet et fantômes. lolikata par olivier poinsignon tatouage clermont-ferrand  2018-2019 Tatouage cotes épaule cou clavicule, noir et gris, lignes et textures , trajet et fantômes. lolikata par olivier poinsignon tatouage clermont-ferrand

2018-2019 Tatouage cotes épaule cou clavicule, noir et gris, lignes et textures , trajet et fantômes. lolikata par olivier poinsignon, tatouage clermont-ferrand
2018-2019 Tatouage cotes épaule cou clavicule, noir et gris, lignes et textures , trajet et fantômes.



Ce début d’année, je voulais faire un test. Je voulais me retirer des réseaux et ne m’autoriser à prendre la parole que 12 fois en 12mois. Pour installer un rythme et surtout garantir un temps de qualité des deux cotés : créateur / réacteur. Mais SURPRISE, on m’a enlevé mon audience sur Instagram en supprimant mon compte sans avertissement. La raison reste obscure à mes yeux et l’objet de la censure ne m’importe plus. C’est un nouveau départ forcé, un nouveau départ dans la communication. Une conscience supplémentaire face au géant qui peut créer un pont vers une audience internationale -une audience qui remplit mon frigo- mais qui peut aussi faire taire en un clic. Je voulais me faire discret, penser un peu plus mes mots avant de l’ouvrir...mais on m’a coupé la langue. Je vais donc parler à voix un peu plus basse.
Mais je dois résoudre ce dilemme “d’entretien du réseau de communication”. Je vais faire de mon mieux pour que chaque intervention serve l’attention de ceux qui croient qu’Internet est encore un outil. Un outil neutre qui sert celui qui l’utilise sans savoir s’il est bien ou mal intentionné. Même si l’on se dit que l’on veut passer uniquement par le producteur, on finit toujours par se retrouver dans les galeries de supermarché...et est-ce qu'Instagram n'est pas devenu la galerie normative mais obligatoire aux tatoueurs ? Est-ce que c’est devenu le supermarché géant qui nous empêche finalement de voir le vrai monde de ''nos tatoueurs'' qui s’autocensurent ? Instagram est aujourd’hui un carrefour OBLIGATOIRE dans le monde du tatouage, mais je vous encourage à ne pas considérer cette place comme un terminus. Instagram relie des pages qui abritent de tous petits liens vers des sites bien plus riches dont l’architecture peut être remaniée. 


Réfléchissez bien et dites-moi quel sont vos 3 artistes tatoueurs préférés sur instagram ... et du coup à quoi ressemble leur site si vous l’avez déjà visité ?



Bonne année 2020, 
Je reste là et je garantis un rendez-vous que vous connaissez déjà : le premier jeudi de chaque mois à 22h22 ...

www.olivierpoinsignon.fr


vous êtes ce que vous mettez dans votre assiette, olivier poinsignon street art






Postface :
le tatouage présenté illustre justement cet article dans une autre dimension. Le tatouage présenté est celui de François Theurel, le créateur du populaire mais intelligent programme : “le Fossoyeur de Film”. Et si je ne dis pas “ c’est le fossoyeur de film “ c’est simplement car il n’existe pas ! J’ai tatoué un être humain dont la fiction ne peut posséder l’identité. Et ça, même si elle a pu le nourrir. 

François a fait un break de communication pendant un an pour revenir avec le projet ambitieux “les Virées Cinéma”. Si vous aimez vraiment le cinéma, j’espère que vous aurez la curiosité d’aller voir les deux premiers épisodes car il a besoin d’aide pour tourner la suite … Chroma vous dites ?
Pour l'autre tatouage qui illustre mon article je n'ai pas vraiment de justification. Je trouve qu'il allait bien. Comme un "cousin graphic" de cette période. Il faudra repasser si cette explication vous déçoit...